Aider un cyclo-cross français en constante perte de vitesse.
- cobbling
- 2 oct. 2015
- 6 min de lecture

Quand on entend parler de cyclo-cross en France, l'affaire se résume très souvent à un nom, Francis Mourey, et à deux épreuves: les Championnats de France et du Monde. Et pourtant, la saison sur route n'est pas encore terminée que le saison de cyclo-cross a, elle, déjà débutée. Seulement voilà, le cyclo-cross en France manque véritablement d'énergie. La Coupe de France de cyclo-cross, qui peine s'imposer comme véritable référence en la matière ne se nourrit que de trois épreuves et le peloton français fond, lui, de plus en plus. Et pour cause, Francis Mourey, qui a surnagé pendant près d'une décénie dans le discipline est aujourd'hui plus proche que jamais d'une fin de carrière (son contrat à la FDJ n'ayant pas été renouvelé) et le Champion de France en titre, Clément Lhotellerie a mis un terme à sa carrière de coureur cycliste quelques mois à peine après avoir conquis le maillot bleu-blanc-rouge. Seul Clément Venturini semble faire exception. Le coureur de la formation Cofidis, Champion du Monde Juniors en 2011, Champion de France Espoirs en 2014 ou encore médaillé d'argent aux Championnats de France Elite en 2015 semble être l'un des rares coureurs français en qui le cyclo-cross peut encore placer de véritables espoirs.

Le cyclo-cross français se meurt. Lentement. Pourquoi? Probablement parce qu'il est quasiment impossible, au jour d'aujourd'hui, pour un coureur français, de vivre du cyclo-cross. Arnaud Jouffroy avait bien tenté l'expérience de rejoindre des Team belges de cyclo-cross comme BKCP Powerplus ou Telenet Fidea, mais il n'en fut rien. Grand espoir du cyclo-cross français, Champion du Monde Juniors en 2008 et Champion du Monde Espoirs en 2010, Jouffroy est ressorti dégoûté de cette expérience. Quentin Jauregui avait, lui aussi, débuté chez les professionnels dans une de ces équipes belges, la formation BKCP-Powerplus, qui abrite aujourd'hui le Champion du Monde en titre, Mathieu van der Poel. Mais le français n'y est pas resté longtemps. Passé stagiaire sur la route au sein de l'équipe Argos-Shimano en août 2013, puis professionnel chez Roubaix-Lille Métropole en 2014 avant de rejoindre AG2R La Mondiale en 2015, Jauregui, Champion de France Juniors en 2012 s'est laissé tenter par la route, ce qui, d'ailleurs, lui réussi plutôt bien. Seulement voilà, ces spécialistes ont, eux aussi, besoin de vivre et il est évident que le cyclo-cross ne suffit pas à ramener à lui seul suffisament d'argent pour vivre toute une année. Pour qu'un crossman puisse aujourd'hui vivre de sa discipline en France, il lui faut courir dans l'une des formations professionnelles de l'Hexagone et donc, participer à la majeure partie du calendrier de la saison sur route avant de pouvoir, éventuellement, disputer quelques cyclo-cross pendant l'hiver, en guise de préparation à la saison sur route suivante. Au jour d'aujourd'hui, seuls deux coureurs semblent faire exception: Clément Venturini, qui n'a plus courru sur route depuis la Brussels Cycling Classic le 5 Septembre dernier, et Francis Mourey, qui ne sera cependant pas conservé au sein de la formation FDJ à l'issue de cette saison.
Cependant, sous l'impulsion de Steve Chainel, son épouse Lucie et de la marque G4, dirigée par l'ancien professionnel Geoffroy Lequatre, la France a vu naître, à l'été 2015, son premier Team uniquement consacré au cyclo-cross. Une équipe qui n'est, pour le moment, composée que de deux coureurs: Lucie et Steve Chainel. Certes le Team n'évoluera pas sous licence Continentale cette saison mais l'initiative vaut le coup d'être soulignée car c'est une grande première dans un pays où cette discipline a de plus en plus de mal à se faire une place aux côtés des routiers.
Mais voilà, le problème du cyclo-cross français ne se trouve pas uniquement du côté des coureurs mais aussi du côté du calendrier. Au jour d'aujourd'hui, si un crossman français veut se mesurer au gratin mondial de sa discipline, il se doit de courir, chaque semaine, en Belgique, sur l'un des différents Challenges qui composent le calendrier international. Et les français ne font pas exception à la règle: on retrouve généralement au départ de ces épreuves des garçons venus de très loin comme le japonais Yu Takenouchi, qui évolue dans l'équipe Continentale Veranclassic-Ekoï, et qui participe à la plupart des manches du Trophée Bpost Bank, du Superprestige ou encore de la Coupe du Monde.
La Coupe du Monde est elle aussi un problème majeur au dévelopement du cyclo-cross. Cette Coupe du Monde n'a, il faut bien l'avouer, pas grand chose de mondial. L'UCI a, certes, accordé cette saison la première manche à Las Vegas (Etats-Unis) et s'était exporté, la saison dernière, en Grande-Bretagne, sur le circuit de Milton Keynes mais, force est de constaté que la quasi totalité des manches de cette Coupe de Monde se déroulent soit en Belgique, soit aux Pays-Bas. Notons tout de même un bon point pour le calendrier français: l'attribution au site de Lignères de la 6e et avant-dernière manche de l'édition 2015-2016 de la Coupe du Monde.

D'ailleurs, pour rendre la discipline plus attractive en France, il faudrait très certainement changer un certain nombre de choses. Tout d'abord, il faudrait organiser, sur notre territoire, une Coupe de France qui comporterait plus d'épreuves. Ajouter à cette Coupe de France des épreuves comme le Cyclo-cross de Marle ou celui de La Mézière pourrait contribuer à rendre cette Coupe de France plus attractive pour les coureurs français. De plus, la majeure partie des cyclo-cross français sont des organisations "régionales". Les cyclos-cross français enregistrés à l'UCI sont encore aujourd'hui très peu nombreux (5 pour être précis en dehors des manches de Coupe de France et du Championnat National) ce qui n'aide pas à attirer les coureurs sur ces épreuves. Seulement voilà, pour inscire une épreuve au calendrier UCI, il faut un certain budget, dont les organisations ne disposent pas toujours, pour ne pas dire quasiment jamais. L'idéal serait donc un plus grand investissement de la part de notre fédération nationale qui pourrait permettre la tenue d'un plus grand nombre de cyclos-cross UCI sur le territoire français et, donc, d'y attirer plus de spécialistes. En effet, depuis combien de temps n'avons nous pas vu un Sven Nys ou un Tom Meeusen disputer un cyclo-cross en France? Depuis combien de temps Mathieu van der Poel n'a-t-il pas couru dans les labourés français? Très probablement depuis la dernière tenue d'une manche de Coupe du Monde sur notre territoire, à Nommay, le 26 Janvier 2014.
Autre véritable problème de cette discipline: son incroyable manque de médiatisation sur le territoire français. Très (et trop) peu d'organisateurs de cyclo-cross en France peuvent aujourd'hui se réjouir de la couverture médiatique accordée à leur épreuve. Les caméras de télévision, même régionales, sont rarement présentes sur ces épreuves. Les directs télévisés inexistants si ce n'est pour les Championnats de France et les Championnats du Monde. Les médias spécialisés du sport peinent à accorder quelques lignes à cette belle discipline, pourtant bien plus dynamique que la route. Le problème est aussi là. Si les sponsors français n'investissent pas, ou peu, dans le cyclo-cross aujourd'hui, c'est que le cyclo-cross ne représente pas suffisament d'intérêt publicitaire pour ces sponsors, et cela est sûrement dû au manque de médiatisation de la discipline. Le cyclo-cross est parfois considéré comme une discipline venue d'une autre planète par les non connaisseurs. Les curieux découvrent cette discipline simplement parce qu'une épreuve a lieu dans leur village mais personne n'entend parler de cyclo-cross à la télévision. Et même le titre mondial de Pauline Férrand-Prévot l'hiver dernier n'a pas arrangé les choses. Alors pourquoi cette discipline est-elle dénigrée par le monde médiatique chez nous alors qu'elle est choyée partout en Belgique? Je ne le sais pas. Mais une chose est sure: les chaines de télévision gagneraient à diffuser du cyclo-cross, le cyclo-cross gagnerait à ce que le cyclo-cross soit plus amplement diffusé en France et les sponsors y gagneraient également. Alors, qu'attendez-vous?
Alors oui, au jour d'aujourd'hui j'ai l'impression que le cyclo-cross français est en train de mourir, lentement mais surement. Mais je crois tout de même en son avenir car il y a toujours la possibilité de faire évoluer les choses. Pour cela, nous devons laisser le temps à cet Cross Team by G4 d'évoluer, d'engager de nouveaux coureurs et de monter les échelons un à un avant de, peut-être, devenir un jour la première équipe de cyclo-cross française à obtenir un statut d'équipe Continentale.
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